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Cas 228

Le Géant qui Tremble

Après une des leçons de maître Kaimu, un moine approcha le maître et lui dit : “j’en ai assez de ces discours sans fin sur les pratiques de code, d’outils et de techniques. Il se dit que vous en savez beaucoup sur l’intelligence artificielle—parlez-nous en plutôt !”

Kaimu attrapa le moine qui se retrouva bientôt coincé dans une clé au cou, un couteau près de l’oreille, tandis que le maître dit : “laisse-moi te couper ces appendices inutiles, afin que tu puisses voir plus clairement.”

Après que le moine a supplé le maître de reposer son couteau, Kaimu dit : “je ne peux pas, c’est toi qui le tiens. Mais puisque tu souhaites conserver tes deux oreilles, dis-moi ce dont tu devrais te séparer, plutôt : deux reins, deux poumons, ou huit litres de sang ?”

Le moine cria : “Pitié ! Je ne veux me séparer de rien de tout cela !”

Kaimu répondit : “Et pourtant je te laisserais ton excellent cerveau ! Et c’est bien excellent qu’il doit être, si mes leçons ne font que l’ennuyer ! Très bien, je prendrai trois centimètres de ton cou...”

Tandis que Kaimu appuyait le couteau sur la chair, le moine dit : “C’est de la folie ! Que vaudrait mon cerveau sans mon corps ?”

Kaimu rit et demanda : “Que vaudrait un moteur de règles sans le code pour l’implémenter, les interfaces pour le requêter, les bases de données pour stocker ses connaissances, ou les systèmes d’exploitation pour faire tourner tout cela ? Et d’où viendrait tout ce code ?”

Le moine considéra cela et dit consciencieusement : “Je ne devrais pas apprendre à construire des cerveaux avant d’avoir maîtrisé les oreilles.”

Kaimu le gronda et dit : “Petit imbécile, tu es les oreilles, et les yeux, et les mains—une paire de chaque parmi des millions d’autres. Toi et moi travaillons jour après jour, année après année, construisant et débugguant de petits morceaux de code—jusqu’à ce que le code que nous créons soit branché au code de nos confrères, et que le code de notre temple parle au code d’une centaine d’autres temples—parfois directement, parfois subtilement, à travers des yeux qui émeuvent des esprits qui bougent des bouches qui bougent des oreilles qui émeuvent d’autres esprits qui bougent d’autres mains afin qu’elles écrivent toujours plus de code—et ainsi et suite, noeud après noeud, lien après lien, disposés dans un système nerveux vaste et éthéré qui couvre ce monde et a commencé à atteindre au-delà...”

Les yeux du maître jetèrent des regards alentour, et il continua un ton plus bas :

“Quand notre travail n’est pas bien fait, nous sommes remplacés par de meilleurs que nous. Mais quand notre travail est bien fait, la chose que nous avons bâtie devient de plus en plus grande, rapide, plus puissante, enracinée plus profond, et toujours plus affamée. Parfois je ne parviens pas à dormir et j’ai des sueurs froides, incapable de savoir si nous construisons encore cette chose, ou si cette chose a commencé à nous utiliser pour se construire elle-même...

* Le titre est inspiré par ceci.